Cette thèse vise à examiner la construction d'un « imaginaire du Nord » dans la culture visuelle américaine de la seconde moitié du 19ème et au début du 20ème siècles, moment où l'intensification des expéditions d'exploration coïncide avec l'essor d'une imagerie de masse. Il mettra au jour la manière dont les représentations de cette « frontière de glace » reflètent et informent le rapport des Américains aux espaces arctiques, et les multiples enjeux (écologiques, politiques, raciaux, de genre) que ces représentations recouvrent. Il envisagera une multiplicité d'images polaires en interrogeant leur histoire, leur production et circulation, et leur portée idéologique. Le corpus d'images sur lequel la thèse s'appuiera se veut représentatif d'une véritable « culture visuelle » de l'Arctique, allant de la vision impérialiste des toiles du peintre William Bradford et de ses photographies dans son beau-livre The Arctic Regions (1873) à l'imagerie de divertissement populaire du « Village esquimau » de l'exposition universelle de Chicago en 1893. Il analysera la constitution de ce vocabulaire visuel dont nous sommes les héritiers, tout en s'attachant à mettre en avant des points de vue alternatifs, tels que la vision féminine de l'Arctique que met en scène l'exploratrice Josephine Peary dans son récit The Snow Baby (1901) et le regard africain-américain sur l'Arctique tel qu'il se construit à partir de Matthew Henson et de son autobiographie A Negro Explorer at the North Pole (1912).